Bouquet est le fruit d’une collaboration entre Paul Litherland et sa mère. Comme point de départ, l’artiste a demandé à sa mère, une jardinière accomplie, de reproduire une oeuvre de Rachel Ruysch, peintre flamande du 17e siècle reconnue pour ses reproductions d’arrangements floraux. S’inspirant de ces bouquets, ainsi que de ceux de Pieter Brueghel l’Ancien et de Jan Davidszoon de Heem, Madame Litherland sélectionne et arrange les fleurs de son jardin. Paul Litherland, lui, s’occupe de la mise en scène, ainsi que du choix des objets et du mobilier qu’il photographie ensuite. Les oeuvres s’inspirent de la tradition hollandaise par le type d’arrangements, les contrastes de lumière, les lignes de force chromatiques trouvées dans les bouquets et l’ambiance générale. Ainsi, malgré l’utilisation d’espèces cultivées en Colombie Britannique et donc différentes de celles utilisées en Europe il y a 400 ans, les oeuvres captent l’essence de la nature morte flamande. La référence est si évidente que le spectateur peut hésiter à savoir s’il s’agit d’une peinture d’époque ou d’une photographie contemporaine, effet renchéri par l’utilisation des cadres baroques pour la présentation.
Cette série de Litherland ne s’arrête pas à une référence esthétique. En plus d’aborder des thématiques explorées dans d’autres projets, tels que la famille (Family Workstations, 2007) et celle du trompe-l’oeil et de l’histoire de l’art (B-side Ellen Gallery, 2015), Litherland revisite, tout en subtilité, les rôles et attentes quant à la masculinité. Aussi simple puisse paraître la prémisse de ce projet, ces bouquets mère-fils du 21e siècle (2000) inspirent des réflexions contemporaines sur le genre, préalablement explorées de manière explicite dans son projet Absolutely Fabulous (1993, 2006). Non seulement le bouquet floral, souvent associé à la féminité, est choisi comme sujet, mais sont mis en valeur le savoir-faire et les connaissances botaniques de sa mère par son rôle crucial dans la conception de ces oeuvres. Issues du jardin, ces connaissances sont encore trop souvent associées au monde domestique et au loisir, alors que Paul Litherland leur reconnaît un rôle central dans une pratique d’art actuel. De surcroît, l’artiste souligne la référence au travail de Rachel Ryusch et rend donc hommage à cette peintre méconnue qui à l’époque était une des seules femmes artistes à avoir une reconnaissance internationale et dont la valeur des oeuvres a été plus élevée que celles de Rembrandt.
Ainsi, Bouquets est une série de ponts (dialogues) intergénérationnels entre mère-fils, peintre-jardinière-photographe, femmes-homme et art-domestique-art. Une suite relationnelle dont la composition et la beauté chromatique séduisent et questionnent.
texte: Roxanne Arsenault
English short description:
In 2000, The artist asked his mother, who was an accomplished gardener, to produce bouquets based on paintings from Dutch artists of the 17th century. The work that acted as the starting point was by Rachel Ruysch, who produced work from the age of 15 almost to her death at the age of 85 in 1750. Other painters like Breughel the Elder and Jan Davidsoon were also referenced.